Alors que pas mal de mes petits camarades sont en train de finaliser leur prépa, de commencer à remplir des tableaux excel avec le détail des calories de leurs plats lyophilisés, j’ai eu envie de partager ici le récit de mon deuxième Marathon des Sables. Pourquoi le deuxième et pas le premier ? Parce que 2012 fut vraiment une année hors norme pour moi, l’année où j’ai enchaîné tellement d’ultras que j’ai encore du mal à réaliser que c’est bien moi sur les photos. J’ai commencé l’année en Inde et je l’ai finie en Antarctique. Pour tout vous dire, j’avais vendu à mes sponsors le fait d’être la première française à courir 4 ultras de 250km dans les grands déserts du monde (je tiens à préciser qu’il n’y avait pas eu de français à l’avoir fait avant moi non plus !). Seulement à l’époque l’Egypte, qui devait être mon ultra « sablonneux et chaud », commençait à basculer dans ce qu’on a appelé le printemps arabe. J’avais tellement la trouille que la course soit annulée la veille comme je l’avais déjà vécu pour le Lybian Challenge que j’ai sauté sur l’invitation comme journaliste au Marathon des Sables. Pas de sponsor à trouver… Une course dont je connaissais le parcours et les codes, c’était plus simple à gérer pour moi qui avais mis 2 ans à préparer ce projet un peu fou. Finalement je suis bien partie en Egypte et j’ai eu la chance inouïe de passer la ligne d’arrivée aux pieds du sphinx mais ça c’est une autre histoire !
Le récit
C’est toujours pareil avec ce type de course… Comment faire le récit d’une aventure pareille qui ne dure pas 45 pages, qui ne sorte pas des banalités du genre « il a fait chaud, y avait du sable et c’était trop dur », qui fasse rêver mais qui rappelle quand même que la réalité n’est pas toujours toute rose et que les larmes peuvent arriver juste après les rires, bref que l’ultra c’est avant tout un ultra-concentré de vie. Ce MDS n’était pas une idée très intelligente et j’en étais consciente. Je rentrais juste de l’incroyable désert d’Atacama, le sac était à peine sec, j’avais trouvé malin de faire mon intéressante sur la tour Eiffel avec un Ecotrail bien sympathique ma foi mais bien casse-pattes et dans les traboules lyonnaises pour compléter mon tour d’horizon des trails urbains, le nouveau concept à la mode (le Lyon Urban trail pour tous ceux qui ne connaissent pas). Moralement, pour des raisons un peu longues à expliquer, et surtout qui ne regardent que moi, je partais avec un sacré handicap. Je sentais poindre à l’horizon un « Australie 2, le retour de la blonde qui refleurit la dune avec ses larmes » (l’année précédente j’avais quasi enchaîné le MDS et The Track, plus de 500km dans l’outback australien, ce qui n’avait pas du tout été une bonne idée selon mes pauvres pieds !). C’est donc tout sauf sereine que j’ai pris la direction d’Orly, encore plus désespérée en constatant que les travaux du futur Starbucks n’étaient pas finis à temps pour que je puisse boire mon traditionnel caramel macchiato lait d’amande avant le décollage.
Je retrouve rapidement des visages connus et surtout, je rencontre enfin des personnes « virtuelles ». Gloria, coureuse ultra libanaise qu’on ne présent plus (Paris Beyrouth en courant… une paille !), est là comme prévu ; Fouad le « bled runner » virtuose de la dune et du clavier, également. Ça papote sévère et nous ne sommes pas encore partis. Je vais faire la connaissance dès le vol d’Amandine qui va m’impressionner tout au long de ce Marathon des Sables par la force intérieure qu’elle dégage. Alors qu’elle partait vers l’inconnu, je savais déjà que rien ne l’arrêterait et qu’elle verrait les dunes de Merzouga. Je vous passe le trajet en bus qui n’en finit pas, la bétaillère pour l’arrivée sur le campement, vous connaissez déjà la musique. Pour les autres, après l’avion, on grimpe tous dans pleins de bus qui nous emmènent au plus proche du camp mais comme le terrain n’est pas assez stable à la fin, on grimpe tous ensuite à l’arrière de camions militaires pour les derniers mètres, l’occasion de gros moments de rigolades en mode « grimpe là dedans ». Je retrouve les tentes noires en me demandant ce que je fous là. Sylvain, un collègue journaliste, m’attend puisqu’il était, avec tous ceux qui devaient constituer ma tente, arrivés eux sur le premier vol et je comprends qu’il y a un problème. Alors que nous devions faire tente commune et qu’ils devaient s’occuper de la logistique puisqu’ils étaient arrivés les premiers, ils n’avaient plus de place pour moi. On m’en a trouvé une un peu plus loin dans une tente qui n’a pas l’air d’apprécier, sur le moment, l’arrivée d’une huitième personne. Je pose ma valise, bien décidée à demander l’asile politique au Luxembourg, comme je l’avais fait l’année dernière, d’autant plus motivée que cette fois-ci, ils ont les toutes premières tentes à gauche en arrivant sur le campement. Cela m’éviterait de prévoir un ravitaillement supplémentaire rien que pour aller les rejoindre comme l’année dernière. Seulement voilà, là aussi, problème : ils sont neuf dans une tente et huit dans l’autre. Du coup, je me résous à rester là où je devais m’installer. N’allez pas croire que j’avais quelque chose contre mes futurs compagnons, c’est juste que se retrouver comme ça au milieu d’inconnus qui ont l’air de former une équipe soudée, pour vivre une course qui peut se révéler difficile me file un peu le bourdon. Arrive le dîner et zou, à nouveau la queue pour manger avec mon collègue Pascal, journaliste de son état et membre émérite de la team presse en charge de faire vivre aux personnes restées chez elles cette folle aventure. Et là petit miracle de la vie, j’entends : « Tu es bien Cécile Bertin ? » Euh… oui, c’est moi. « Je suis Cédric le podologue de Thyo, tu sais, les chaussettes ? » Mais oui, je sais qui tu es ! Bon là tout de suite je suis super-gênée parce que je vais tester les Compressport pendant la course mais je suis contente de tomber sur lui par hasard. En quelques minutes surtout, je suis présentée au reste de la troupe qui constitue sa tente et surtout, comble de bonheur, on me propose spontanément la huitième place. Je suis un peu gênée de les envahir mais je me suis sentie tout de suite bien avec eux, comme ça, d’instinct, et c’est donc le cœur léger que je file chercher ma valise pour intégrer la tente 8, ma nouvelle maison pour sept jours. Enfin ça, ce sera pour la version officielle. Selon Pascal, je me suis carrément invitée, du genre à faire le regard de chien battu qui couine gentiment pour qu’on le laisse entrer dans la maison… ou façon J’irai dormir chez vous version féminine ! Bref, j’ai honteusement tapé l’incruste.
Présentation des troupes :
- Il y a donc Cédric. Je profite de l’occasion pour le remercier pour tout, vraiment tout. Sans lui, ma course n’aurait pas été la même. Vous comprendrez en lisant ce texte qu’il a joué un rôle primordial jour après jour et je ne serai jamais assez reconnaissante de tout ce qu’il a fait pour moi.
- Son comparse Thierry, autre podologue de son état. Ah ben oui, une fille aux pieds d’argile choisit une tente avec deux podos, pas folle la guêpe ! Il révèlera très vite un goût on ne peut plus spécial pour la chanson française. En fait il était là parce qu’on l’avait recalé au casting de The Voice et il venait noyer son chagrin dans le sable.
- Marie-Claude, dite Coco, dite Robert, rapport à sa lourde tendance à vouloir rajeunir à tout prix pour revenir à sa période capillaire The Cure. Elle a aussi trois particularités et non des moindres : des culottes coupées au laser – parce qu’en Charente, on ne rigole pas avec deux choses : les chaussons et les culottes – des lingettes miracle que tu mets une goutte d’eau dessus, tu as un drap de bain humide pour te rafraîchir et un sac digne de Mary Poppins avec toujours des trucs à manger dedans !
- Guy, un de ses deux compagnons, qui a une légère tendance cleptomane avec les sacs à caca mais bon je vais éviter de trop en dire pour ne pas ternir la réputation d’un homme. Nous savons tous que c’était toi !
- Philippe, le dernier du trio infernal, toujours de bonne humeur, qui décidera un jour que maintenant ça suffit de se traîner et qu’il va courir un peu parce que ça lui fait trop mal de marcher. C’est bien simple, on lui laissait deux jours de plus, il montait sur le podium !
- Mous, l’homme qui dort plus vite que son ombre, tu le poses par terre et zou tu l’oublies, il ne bouge plus… et surtout un allié de choc puisque, parlant la langue locale, il va nous faciliter le quotidien à un point difficile à imaginer. J’ai bien cru qu’un jour on finirait par nous apporter le petit déjeuner au lit avec croissant frais et thé vert. C’est bien simple, on venait le voir sous la tente pour savoir si nous n’avions besoin de rien. Que du bonheur ! Il a en revanche une passion pour le hachis parmentier que je ne m’explique toujours pas.
- Renaud, ah Renaud, alias Mister mobylette, alias l’homme qui réussit à rester beau en slip ce qui, avouons-le, n’est pas donné à tout le monde ! Il a une autre qualité, il a fait la Trans Aq’ comme moi et il a couru le Marathon du Pôle Nord. Alors, hasard ou coïncidence ? Il a couru en haut, j’ai couru en bas et nous nous retrouvons au milieu… Il est là, avec Cédric et Thierry, pour représenter une cause, « Vaincre la mucoviscidose » mais je vous en dirai plus dans la suite de mon récit.
Le premier jour sur le campement se passe comme à son habitude, le temps s’écoule lentement, comme pour nous mettre à l’épreuve. On a envie d’être au lendemain, sans trop vouloir y aller non plus. Tout le monde joue à se coller des bandes blanches partout sur le corps comme les Indiens se couvrant de peintures de guerre avant de partir au combat. On compare son sac, on ne joue pas à celui qui a la plus longue mais à celui qui a le plus léger. La tension est palpable, sacrebleu, lâchez-nous dans le bac à sable !
Etape 1 – 33,8 km Ammouguer/Oued El Aatchana
Dès le début, je comprends qu’on va en baver. Je ne sais pas pourquoi mais je trouve la plongée dans le bac à sable un peu trop rapide à mon goût. J’ai décidé d’y aller tranquille parce que j’ignore comment mon corps va réagir à l’enchaînement un peu trop rapide des ultras. J’ai tellement en mémoire mon échec australien que je prends mon temps. Je trottine jusqu’au CP1, je marche dès que ça monte un peu trop, je bois très régulièrement et je mange même à intervalles réguliers. Mon sérieux m’épate ! Je tombe sur Tun un ami rencontré lors de l’édition 2011 qui a décidé que tout le désert devait connaître mon prénom et je finis avec Benoît, « élève » de Bruno Heubi avec qui j’avais discuté en amont de la course pour l’aider à préparer la sienne, enfin son sac, parce que l’entraînement, je laisse ça aux pros. Une tradition se met en place dès le premier jour avec Pascal, passé de l’autre côté de la barrière et qui est venu uniquement pour faire chauffer ses doigts sur le clavier et non ses pieds dans ses baskets. Il m’attend chaque jour sur la ligne d’arrivée, c’est un vrai plaisir qui va avec ma tasse de thé chaud à la menthe Sultan.
Tout irait bien dans le meilleur du monde s’il n’y avait pas un vent de folie au campement avec du sable à ne plus savoir qu’en faire et surtout l’apparition de deux belles ampoules sur mon pied droit. Je n’avais rien vu avant la douche mais force est de constater que c’est reparti pour un tour. Thierry les attaque à l’Eosine, je hurle à en faire trembler les dunes, j’ai du mal à manger. Mais qu’est-ce que je fous là… Et pour ajouter à la folie qui règne dans ma tête, c’est aussi la folie sous la tente avec une bouteille de vin rouge, une mignonnette de Ricard et un petit salé aux lentilles dans sa boîte métallique qui font miraculeusement leur apparition ! Je suis tombée chez les fous… On souffre, certes, mais qu’est-ce qu’on rigole !

Etape 2 – 38,5 km Oued El Aatchana/Taourirt Mouchanne
L’opération « Tempête du désert » est lancée. Je vous jure, si le sable était calorique nous serions tous rentrés de ce MDS gras comme des loches. Je n’ai pas le choix, il me faut gérer mes pieds qui se révoltent et une course qui ne fait que commencer. Ma tactique est simple : je prends de l’avance en courant tranquille jusqu’au CP1, je marche entre le CP2 et le CP3 et je redémarre en fonction du terrain pour finir. Comme de toute façon le moustachu est sur un autre continent, je peux faire ce que je veux l’esprit tranquille. Petite digression explicative : le moustachu, alias Pierre Convert, est un copain qui considère que tout coureur qui marche quels que soient le dénivelé, la nature du terrain ou la distance, n’est pas digne de sa médaille. Autant dire qu’il n’a pas que des amis dans le monde de l’ultra ! Et que moi je ne peux m’empêcher de penser à lui dès que j’arrête de trottiner. Seulement c’était sans compter la rencontre totalement improbable avec Carlos, chirurgien argentin de son état, vivant à Dôle, dans le Jura. Ne cherchez pas, il n’y a qu’à moi que ça arrive, ce genre de rencontre ! Il n’a qu’un défaut, il a décidé de courir un peu et il m’entraîne avec lui. Je m’accroche comme une folle et nous allons passer la ligne d’arrivée avec un autre Argentin ramassé au passage, un drapeau blanc et bleu tendu entre nous. J’ai porté les couleurs du Luxembourg en Atacama, je porte les couleurs de l’Argentine au Maroc, comme le dit si bien mon copain Pascal, ça tient des Nations Unies, cette course.
En revanche, du côté des pieds, ça commence à tenir de la boucherie. J’ai mon Opinel dans une main, mon briquet dans l’autre et j’envisage de plus en plus l’amputation de mes problèmes. De toute façon, ce sera plus pratique pour mes escarpins pointus qui doivent être conçus sur des femmes à quatre orteils ! Côté tenue, je teste une jupe et un T-shirt Icebreaker. Aucun doute, après deux jours de course dont un par 52 °C au sol, ils ne sentent pas, c’est impressionnant. Par contre, je me suis trompé de taille, me voyant plus grosse que je ne le suis et le M flotte, provoquant des frottements dans le dos. Mais rien de bien grave, tout cela reste gérable. Force est de constater en tout cas que cette édition va être une sacrée édition, nous en sommes déjà à une vingtaine d’abandons et l’étape longue n’est pas encore passée. J’ai découvert que Renaud n’est en fait pas une mobylette mais une grosse cylindrée qui va tout simplement deux fois plus vite que moi. Cela lui vaudra régulièrement des phrases intelligentes de ma part le matin au départ du genre : « Dis, t’es mignon, tu me fais couler un bain et tu passes l’aspirateur sous la tente avant que j’arrive ? » et autres débilités dont j’ai le secret. Blague à part, ce mec me sidère. Il est classé parmi les premiers et il est la discrétion même. En bon ancien scout, il assure côté bois et autre barbecue. J’en suis à un point que je me dis qu’un jour je vais rentrer au campement et découvrir un chevreau en train de griller à la broche parce qu’il aura en plus eu le temps de chasser avec son Opinel ! Et tout ça avec le sourire, cela va s’en dire. Avec mon service de podologie 24h/24, mes lingettes à disposition et la bonne humeur constante, je bénis ma tente 8.

Etape 3 – 35 km Taourirt Mouchanne/El Maharch
Troisième jour et je ne suis toujours pas dans la course. Mes pieds me font souffrir, enfin le droit surtout, le vent de sable m’ensable les oreilles et le cerveau, j’en ai marre… J’ai pour le moment juste l’impression de subir ma course. J’avance et je plonge dans ma musique pour ne surtout pas penser. C’est idiot, ça va paraître étrange à ceux, nombreux, qui profitent de l’occasion pour faire le point sur leur vie mais, là, moi, je ne pense à rien. Mais alors rien de rien. Le seul truc qui me traverse parfois l’esprit dans la journée c’est : « Mince ça fait combien de temps que je n’ai pas fait pipi ? »… Ce n’est pas avec ça que je vais décrocher le Nobel ! Et encore moins le Pulitzer. Je me traîne, quand je marche, je boite, quand je cours, j’ai mal… Heureusement que tout d’un coup surgit Sébastien de Metz, bien décidé à papoter pour me sortir de ma coquille. Il me raconte qu’il court avec des copains, qu’ils ont tous financé leur course personnellement et passé l’année à trouver des fonds pour équiper un jeune garçon handicapé d’un fauteuil électrique, ce qui va lui changer la vie et améliorer son quotidien. Tiens, prends ça dans la tronche ma grande… Arrivée sur le campement, je ne suis pas très bien, nauséeuse à souhait et je demande même à Pascal de m’accompagner parce que j’ai peur que mes jambes se dérobent. Lorsqu’arrivent les pompiers de Vannes et la joëlette, je me précipite, courant en canard, pour les accueillir et l’émotion que ce groupe dégage, leur force, me tirent les larmes des yeux. Tiens, reprends ça ma grande…
Le coup de grâce va m’être donné par Renaud. Alors que je suis allongée sous la tente, mon pied tout pourri sous le nez du pauvre Cédric qui doit se maudire de m’avoir « invitée » à me joindre à eux, une bénévole passe par là pour discuter avec le représentant de l’équipe « Vaincre la Mucoviscidose ». Elle a perdu son petit frère après des années que je ne pourrais pas qualifier de vie mais bien de survie. Renaud parle de sa fille, de son combat pour juste respirer et là je me sens mal. Je suis qui pour me plaindre, avec ma petite ampoule infectée ? Il est grand temps de « fermer ma gueule » et de commencer à profiter de la course parce que moi, j’ai la chance de pouvoir être là, j’ai la chance de pouvoir courir si l’envie m’en prend. J’ai eu la chance de voir naître mes enfants, d’avoir eu 40 ans, de pouvoir aller à l’autre bout du monde si l’envie m’en prend, Marine ne l’aura peut-être pas, cette chance… Sans le savoir, sans s’en rendre compte, Renaud a donné un sens à ma course, il lui a enfin donné une âme.
Etape 4 – 81,5 km El Maharch/Jebel El Mraïer
Le grand jour arrive… Nous le savons tous, la longue est la grande étape du MDS, celle où « ça passe ou ça casse ». Pour moi, c’est un peu plus facile puisque je connais ce genre de distance mais cela ne suffit pas à me rassurer. J’ai très mal dormi parce que je souffre du pied droit qui me lance terriblement (je me suis même relevée la nuit pour faire les 100 pas histoire de m’occuper l’esprit et trouver le sommeil) et surtout à cause des ganglions qui sont apparus. En me retournant sur le ventre la nuit j’ai fait un bond, réveillée par la douleur. Pas de doute, l’infection est installée. Cédric insiste gentiment sur le fait qu’il va falloir se résoudre à passer aux choses sérieuses et envisager les antibiotiques. Nous ne sommes pas dans des conditions d’hygiène suffisantes pour endiguer naturellement ce genre de problème et c’est la mort dans l’âme que je me traîne au centre du campement pour aller à la rencontre des docs qui assurent la permanence pré-course. Je n’aime pas les médicaments… Je n’aime pas les médecins… Je suis fille de médecin… Pire patiente que moi, y a pas. Après un conciliabule, la nouvelle tombe : les antibiotiques sont sous clé, partis avec le grand chef. Il faudra attendre l’arrivée de la longue pour commencer le traitement. Cédric, l’homme aux doigts de fée, m’a fait un pansement à la Bétadine pour limiter la casse et zou, c’est parti pour presque 82 km de ce qui s’annonce déjà comme un remake de la retraite de Russie version blonde en nettement plus chaude et sablonneuse.
La course est lancée et je tente de faire redémarrer la machine. C’est quoi tous ces cailloux, d’abord ? Ils me cherchent ou quoi ? Le premier CP est là et alors que je m’apprête à m’élancer à l’assaut du deuxième, on m’arrête en plein vol. « Cécile ? Le doc t’attend. » Ah mince… En fait, le grand patron est là, il a été prévenu par radio et il m’attend de pied ferme avec ma dose quotidienne d’antibiotiques. Je joue les petites filles sages, je les avale en priant intérieurement pour que les effets secondaires n’arrivent pas trop vite. Je suis la reine des effets secondaires, je les fais toujours par ordre alphabétique. Je sais que pour les limiter, il faut que je mange correctement avant de les avaler, mais je n’ai prévu que des cacahuètes moi aujourd’hui. Bon, allez, on arrête de se plaindre deux secondes et on passe justement la seconde parce que cette longue étape ne va jamais finir sinon ! Je vais aller de CP en CP ou plutôt de doc-trotter en doc-trotter puisque à chaque fois, je dois montrer patte blanche pour continuer : on me prend ma température, ma tension parfois, et on papote avec moi histoire de voir si je ne délire pas. Et j’avance inexorablement, kilomètre après kilomètre, caillou après caillou, grain de sable après grain de sable. Parfois je cours, parfois je marche. Alors que je papote tranquillement avec Brian, un Américain de l’Oregon qui me raconte un mariage surréaliste auquel il a assisté au fin fond de l’Ardèche réunissant la famille d’un ami américain originaire dudit trou paumé avec une Coréenne venue avec toute sa tribu surgit Christophe Le Saux que j’ai surnommé affectueusement « l’autre blonde de l’ultra ». C’est un de mes chouchous et je ne m’en cache pas. Je ne suis pas du genre « fan », je n’ai pas l’admiration facile surtout vis-à-vis de coureurs qui après tout ne font strictement rien pour la planète et qui mettent juste un pied devant l’autre plus rapidement que moi, ce qui n’est pas en soi un grand exploit. Il m’a promis, le matin même, de faire comme en Australie, de m’encourager en passant. Il s’arrête deux secondes pour papoter, m’encourager sous le regard halluciné de ses deux poursuivants. Il repart de plus belle et Brian me dit : « But who’s this man ??? » Ben c’est Cricri mon grand ! Ils sont comme ça les vrais champions chez nous.

A la nuit tombée, je renais un peu de mes cendres comme à chaque fois, même si je peste contre ce tracé qui ne me laisse aucun répit. Moi qui pensais trouver du roulant pour arrêter de me poser des questions, je dois toujours rester en éveil. La nuit tombe, le bal des frontales commence avec le secret espoir qu’enfin apparaisse dans le fond de la nuit noire là-bas une clarté, une lueur d’espoir que tout cela est enfin fini. Mais rien. Alors que l’année dernière je m’étais accrochée au rayon vert du laser qui brillait dans le désert, il n’y a rien pour me guider, juste ma frontale, celle des autres coureurs qui m’entourent et me rassurent par leur présence. Nous avançons tous comme des manchots empereurs déchus de leur trône. Les regards sont souvent hagards, perdus dans le vide de leur pensée. Il faut avoir vu un jour une caravane de ces coureurs épuisés pour comprendre de quoi je parle. Il y a plus que la fatigue physique, il y a cette fatigue morale, plus profonde, qui creuse les traits, donne avec la barbe de trois jours dix ans de plus aux hommes qui avancent vers cette foutue ligne d’arrivée qui n’arrive pas. Je parle uniquement des hommes parce que nous les femmes nous restons toujours aussi fraîches que la rosée du matin. Oh ça va je rigole un peu… elle est sur nos mollets, la barbe de trois jours !
Soudain une lueur, un espoir, très vite déçu. Ce n’est pas le campement mais un 4 x 4 planté à la verticale dans le sable avec un homme qui devant, armé de sa pelle, tente de dégager l’engin. Je reconnais Patrick Bauer, the Big Boss, je lui demande : « Combien de kilomètres encore ? », « Une dizaine de kilomètres ma grande », « elle était vraiment dure celle-là, tu sais, Patrick », « je sais Cécile, je sais… » Mon objectif d’arriver avant 1h du matin s’éloigne mais je peux y être juste après. Un coureur australien me double, déchaîné, comme shooté par l’endomorphine de la fin qui s’annonce. Je m’accroche, je le rattrape, on fait la course comme deux gamins euphoriques. Il me lâche mais je ne lâche rien, les lumières sont là enfin. J’accélère, je lève les genoux, pour un peu j’aurais l’air d’une coureuse ! Un couple main dans la main apparaît juste devant moi et alors que je m’apprête à les doubler, je m’arrête en plein vol, je viens de les reconnaître. Georges et Monique, amis du Luxembourg, sont là souriants et je me vois mal ne pas passer la ligne à leur côté, comme un symbole. Ils étaient là en Atacama avec moi, c’est un peu de mes quatre déserts qui m’accompagne pour ces quelques mètres (ils seront là à mes côtés en Egypte aussi d’ailleurs). Enfin, j’y suis, il est un peu plus d’une heure du matin, j’ai fini la longue, je suis heureuse. Pascal est là, fidèle au poste, le thé chaud aussi d’ailleurs. Il m’annonce le bouleversement de la tête de course avec un Rachid fauché en plein vol par une fracture de fatigue à quelques mètres de l’arrivée. Je file rejoindre ma tente, me débarbouille rapidement et je dors d’un œil, en attendant l’arrivée de toute la troupe. 3h du matin, tout le monde dort sous la tente 8.
Jour 5 – Jour off ou Les Sept Plaies d’Egypte
Alors que ce jour est généralement réservé aux grandes lessives, aux grandes siestes et aux grandes bouffes, nous attaquons par de grands vents de sable. Je tente une virée à l’accueil pour donner des nouvelles mais je me rapatrie rapidement pour me mettre à l’abri dans ce qui va se transformer en journée cauchemar. Le sable s’infiltre partout, recouvrant tout sur son passage, même dans notre tente. Vous ouvrez votre sac deux secondes et il s’alourdit de 500 grammes… Nous nous planquons dans nos duvets, priant pour que tout cela s’arrête enfin. Je ne me suis pas lavée à l’arrivée de la longue et je voudrais juste pouvoir me rincer mais sortir est tout bonnement impossible. Grâce aux garçons toujours aussi efficaces il faut bien le dire, nous sommes parmi les moins à plaindre mais ce qui devrait être une journée de repos va se révéler encore plus épuisant qu’une journée à traverser les dunes en plein cagnard. Midi sonne avec l’apothéose de la journée : une averse de grêle ! Non, vous ne rêvez pas, nous avons eu de la grêle dans le désert, mouillant la tente, mouillant le sable… Et mouillant les derniers concurrents qui doivent encore rallier le camp. Il nous manque l’invasion de sauterelles et nous sommes bons. Pourtant, l’ambiance reste positive sous la tente. Les garçons toujours pleins d’imagination décident de faire un feu genre « on va fumer le saumon en prévision des fêtes de fin d’année » directement sous la tente. Nous sortons nos gamelles tout en tentant de limiter l’inondation de nos sacs. Du grand délire.

Enfin, le calme après la tempête. Je n’y croyais plus ! Alors que d’habitude l’après-midi est consacrée à la sieste, nous allons le passer à ranger notre maison, ambiance « Blanche Neige et les sept nains ». Nous lavons enfin notre linge, nos corps fatigués par quatre jours de course, nous secouons les tapis, vidons nos sacs, une vraie fourmilière de toutes parts. Bonjour la journée de repos… Autre éclaircie, la crêpe party organisée par mes voisins dont Didier Benguigui, le « célèbre » non voyant du MDS et grand ami de ma copine Linda, la seule coureuse que je connaisse qui ait osé courir le marathon de Jérusalem déguisée en Bunny Playboy. J’ai les photos ! J’ai transporté depuis le début de la course 100 grammes de pâte à crêpes, j’ai donc droit à ma part. A ceux qui se poseraient la question, oui, ils ont bien transporté une crêpière… Soirée dégustation de bonbons miraculeusement sortis d’un sac à dos, histoires drôles de Renaud, la nuit arrive, le jour off s’achève, je suis encore plus épuisée que la veille.
Etape 5 – 42,2 km Jebel El Mraïer / Merdani
Le marathon… Distance familière pour la plupart des coureurs mais tellement traître pour des organismes fatigués par quatre jours de course. Je suis contente parce que je sens que l’infection s’éloigne mais la douleur est toujours là. Elle se fait plus discrète mais reste lancinante, sourde, présente à chaque fois que je pose le pied à terre, qu’il rencontre un caillou. Alors que l’étape longue était épuisante, ce parcours s’annonce roulant, presque trop roulant. Tout le monde part bille en tête et moi je tente de suivre le rythme. J’arrive au premier CP beaucoup plus vite que prévu, je veux ralentir mais ça continue encore et encore. Je ne ralentis pas vraiment, la peur au ventre. Je vais exploser… Il faut que je calme le jeu, j’ai en mémoire l’année dernière où j’ai fini sanglotant sous un palmier, réclamant qu’on m’achève là, qu’on m’abandonne, et cette pensée m’obsède. Il y a bien quelques passages boueux qui alourdissent les chaussures mais si peu de temps qu’on repart de plus belle. Je finis par me planquer autant pour faire pipi que pour souffler un peu ! Le CP 3 est déjà là et avec lui, la perspective de finir cette dernière étape beaucoup plus vite que l’année dernière. Tu me diras, neuf heures, ce n’est pas non plus très difficile à battre… Sarah, la jolie Mauricienne qui est aussi blonde que moi et qui pourrait presque être ma fille, apparaît. Je lui propose une arrivée de blondes et nous partons tambour battant, queues-de-cheval au vent. Un 4 x 4 de l’organisation est là en haut d’un relief avec deux doc et un panneau où il y a écrit « Surprise ! » A notre passage, l’un des garçons soulève la feuille et nous voyons apparaître : « Il reste 3,800 km ! » Je lui crie au vol : « Tu sais que je t’aime, toi ! » et il me répond : « Reviens ! » Nous filons toutes les deux et je sens que Sarah s’accroche comme elle peut. Elle me demande comment se passait l’arrivée des familles qui rejoignaient le campement par le biais de Terre d’Aventure. Je lui raconte que l’année précédente, ils étaient à l’arrivée du marathon. Son homme et sa maman sont de la partie alors je sens que la motivation est là. Au vol, nous accrochons un Anglais avec qui je plaisante. Il est à la peine et je l’encourage en lui disant : « You need to run, for your queen ! » Il se marre et accélère un coup. Nous le redoublons à nouveau avec moi criant : « Girl power » ! Je tente avant tout de divertir ma collègue blonde qui serre les dents pour ne rien lâcher. Un autre Anglais se joint à la troupe et nous fonçons vers l’arrivée escortées par nos deux bodyguards. A deux mètres de l’arrivée, je me contente de leur dire : « Ladies first », ils sourient, se décalent d’un mètre et nous laissent passer en vrais gentlemen. Le marathon est fini, le MDS est fini, le sort est brisé, j’ai réussi mon pari et je n’ai pas pleuré… A relire ce paragraphe je rigole, on a l’impression que j’ai mis trois heures pour courir un marathon ! Tu parles, Charles. Mais je te jure, Pierre le moustachu, ne rigole pas, j’ai vraiment couru ce jour-là !
Je me dirige tranquillement vers le campement, très fière de moi, et j’ai droit à un accueil tout en diplomatie de Renaud qui sait peut-être courir vite mais beaucoup moins parler aux femmes : « Punaise t’as sacrément pris aujourd’hui. » Quoi ? Oh ça va, toi ! Je sais que je suis rouge pivoine avec des marques de lunettes ridicules, t’es pas obligé d’en rajouter ! Tu sais combien ça pèse, un poudrier de Terracotta Guerlain ? Je fais ce que je peux avec les moyens du bord, OK ?! Mon euphorie retombe brutalement avec l’annonce de deux mauvaises nouvelles : Damien, le compagnon de Laurence Klein, s’est blessé suffisamment grièvement pour que la course s’arrête pour lui et Albert, un des Français classés dans les cinquante premiers, a fait un arrêt cardiaque nécessitant une évacuation immédiate. Un rappel un peu violent s’il en est que le MDS reste une vraie course et pas seulement une randonnée comme beaucoup le pensent…
La soirée s’écoule doucement avec l’opération « il faut vider son sac pour le dernier jour ». Je n’ai pas le courage d’aller écouter le concert qui ne sera qu’un bruit de fond pendant mon dîner. J’irai faire un tour pour apercevoir quelques images de la projection des vidéos réalisées pendant la course et vous savez quoi ? Je vais trouver le moyen de me perdre en tentant de rentrer au campement ! Déjà que je ne retrouve ma tente que parce qu’ils ont la bonne idée d’accrocher le drapeau de l’association dessus… Eh bien moi je dis, la course d’orientation, ce n’est pas pour tout de suite ! Dernière nuit dans le désert, je ne dirais pas que je suis triste, ce serait mentir. Je ne pense qu’à une seule chose : mon lit qui m’attend samedi soir et ma douche.

Etape 6 – 15,5 km Merdani / Merzouga
Nous le savons, nous allons terminer par une dernière plongée dans le bac à sable. Nous étions venus là pour bouffer de la dune, on va nous en servir jusqu’à l’écœurement et jusqu’à la dernière seconde. Nous sommes prévenus qu’il y aura bien un CP intermédiaire mais pas d’eau distribuée. Il va donc falloir gérer pour ne pas se retrouver à sec, comme une pauvre voiture en panne sur le bas-côté de la route. Alors que nous partons je découvre consternée que j’ai mal éteint mon lecteur MP3 et qu’il est déchargé. Mince alors… L’idée de faire tout ça sans musique me file déjà le bourdon. Quand je n’écoute pas de musique, je pense et si je pense, je suis foutue. Heureusement surgissent tels des Zorro sur leurs fiers destriers Benoît et Sarah qui cohabitaient sous la même tente, ce que j’ai oublié de préciser plus tôt. Je prends le train en marche et commence la parlote avec Benoît. Sans nous en rendre compte, nous allons semer Sarah qui me racontera plus tard qu’elle a dû s’arrêter quelques instants à cause de douleurs au genou. Dans le flot de coureurs qui s’élancent vers la délivrance, nous n’avons pas réalisé l’écart qui se creusait entre nous. Je sais que Benoît est plus rapide que moi, plus nous avançons, plus je galère à le suivre et plus je me rends compte que je n’ai pas envie de finir ce marathon des Sables 2012 toute seule. Je lui propose alors de tout faire pour finir ensemble, histoire de partager ce moment avec au moins un visage connu et il accepte volontiers ma proposition. Il faudra les dunes pour que nous commencions à parler vraiment et finalement faire réellement connaissance. L’avantage avec ce genre de course c’est que nous ne sommes pas là pour faire semblant, nous parlons sans détour de nos peines, nos joies et j’avoue que j’apprécie cette « proximité » qui se créée entre les coureurs. On peut faire semblant deux ou trois jours mais pas six…
Alors que nous sommes à 3 ou 4 km de l’arrivée surgit devant nous un coureur que je reconnais tout de suite pour avoir vu son short pendant cinq jours en Inde. Mohammad, Jordanien de son état, ne devrait pas être là… Il devrait presque être à Ouarzazate en train de prendre une douche. Je m’arrête à son niveau et prends des nouvelles. Il est blessé à la cuisse et il marche. Aussitôt, je pense à son eau. Il n’a que de toutes petites gourdes sur lui, je le sais, je me suis toujours demandé comment il faisait pour se contenter d’aussi peu d’eau. Maintenant, je sais aussi qu’il court normalement tellement vite que le temps qui s’écoule entre deux check point n’est pas le même que le mien. Je lui propose de l’eau, je le vois hésiter, et finalement il me tend sa gourde à remplir. J’ai vu juste, il n’a plus d’eau du tout et il lui reste facilement 30 à 45 minutes de marche à ce moment-là. Je ne me pose pas de questions, je partage et puis c’est tout. Nous repartons de plus belle et quelques secondes après, Benoît me rassure en me disant qu’il aura de quoi nous hydrater tous les deux jusqu’à l’arrivée. Enfin l’arrivée se profile à l’horizon, je crois bien que nous accélérons tant que nous pouvons dans les dernières dunes et c’est main dans la main que nous passons la ligne, le sourire aux lèvres avec Pascal comme photographe officiel. Bénédicte, mon Ironwoman copine du Luxembourg et surtout colocataire du MDS 2011, est là aussi comme pour boucler la boucle. L’édition 2011 percute de plein fouet l’édition 2012. Dieu que c’est bon ! Nous pouvons nous lâcher, nous dansons toutes les deux devant le regard ahuri des spectateurs présents qui se demandent si nous avons bien couru 250 km pour être en forme comme ça. Je console en prenant dans mes bras un Marocain banquier vivant à New York que l’émotion submerge. Carlos mon Argentin du Jura arrive aussi. La grande famille du MDS est là, riche en couleurs et en émotions.

Voilà, c’est fini. Deuxième et certainement dernière édition pour moi parce que je ne vais pas courir la même course tous les ans, même si je comprends aisément ceux qui deviennent accros à cette ambiance si particulière qui règne chaque année début avril du côté du sud du Maroc. Je ne pensais pas prendre autant de plaisir avec cette course qui était avant tout « professionnelle ». Elle me faisait peur, je me suis finalement régalée. Jamais je ne remercierai assez la tente 8 et surtout Cédric pour tout ce qu’il a fait pour moi. Supporter la vue de mes pieds tout pourris chaque matin juste après son petit déjeuner, franchement, je ne sais pas comment il a fait. Et sans sa gentille insistance je le sais, je ne serais jamais allée prendre ces foutus antibios qui ont finalement sauvé ma course et m’ont évité la débandade australienne. Merci à tous d’avoir été un cocon où j’ai aimé venir me réfugier après avoir passé la journée dans ma bulle sur chaque étape.

Je ne peux pas ne pas citer encore une fois Pascal qui, par sa présence chaque jour sur la ligne d’arrivée, me motivait à finir plus vite pour qu’il ne m’attende pas trop longtemps et puisse retourner travailler, rassuré de m’avoir vue sur mes deux pieds.
Difficile de citer tous les visages rencontrés pendant ces sept jours : Marie-George et Pascale, rencontrés lors de mon premier non-stop algérien ; Danièle et Gloria qui étaient là lors de mon stage prépa marathon, à mes débuts de coureuse comme un symbole de ces six dernières années de ma vie ; Josette et son mari qui m’ont épatée par leur bonne humeur constante, leur gentillesse et surtout leur rythme effréné ! Amandine qui est une sacrée nana comme je les aime et qui a sacrément de la chance au vu de la surprise qui l’attendait en haut d’une dune à l’arrivée. Son fiancé s’est débrouillé pour venir l’attendre en haut de la dune ! Ils sont aujourd’hui mariés et parents de trois beaux enfants. Sarah aussi d’ailleurs avec trois superbes enfants elle aussi.
Merci à tous les coureurs qui sont venus me voir ou qui m’ont, à un moment, encouragée, soutenue, parce que chaque sourire compte dans les moments difficiles et parce qu’ils ont donné un visage à cette course multiculturelle et multiethnique par excellence.
Signe du destin, en rentrant chez moi m’attendait déjà l’écusson de la course en Gobi début juin, histoire de me rappeler que l’aventure continue, qu’il va falloir se reposer pour mieux repartir vers de nouvelles aventures. Une blonde en Chine, ça je ne vous l’ai pas encore fait !
P.S. : pour ceux que ça intéresse j’ai fini à la 333e place ! Pour une fille dont le chiffre porte-bonheur est le trois, avouez qu’on ne peut pas rêver mieux. Après un dossard 33 à Lyon, je crois que tous les signes sont là pour faire de 2012 une grande année pour moi.
P.S.S. : et celui-là j’aurais aimé ne pas avoir à l’écrire, Marine nous a quittés quelques mois après cette course, son corps n’ayant plus la force d’attendre une greffe cœur poumon… Rien à rajouter.

Crédit photos : orga et perso (pour info, les photos officielles n’ont pas été prises l’année de ma participation, je les ai choisies dans la base de photos mises à dispo pour les journalistes parce qu’elles illustrent bien mes souvenirs et mon récit).