J’ai découvert Perrine grâce à Marine ! Mais contrairement à cette dernière, Perrine Fages est devenue bien réelle après des mois à la suivre via les réseaux sociaux. On a toujours un peu peur d’être déçue quand on rencontre ses héroïnes en vrai mais là aucune déception, juste l’envie de partager avec vous notre dernière discussion !
Oui, j’ai vraiment connu Perrine via Marine, la Marine Leleu ultra connue sur les réseaux sociaux. Alors qu’elle réalise son Enduroman, je découvre qu’elle n’est pas la seule française à avoir relevé ce défi de dingue (petit rappel : 140 km au départ de Marble Arch de Londres jusqu’à Douvres sur la côte du Kent, traversée de la Manche à la nage (distance la plus courte 33,8 km / 21 miles) jusqu’aux côtes françaises et se termine du vélo, 289,7 km de Calais jusqu’à l’arc de triomphe de l’Étoile à Paris). Perrine s’est élancée avant Marine mais les conditions météo se dégradant on la fait remonter dans le bateau alors que les côtes françaises sont en vue. Elle négocie de pouvoir y retourner quelques jours après Marine et là elle finit enfin en 67h21 devenant la meilleure française sur cette petite rigolade. Mais qui est vraiment Perrine ? Il est grand temps de la laisser parler un peu !

Perrine,
un destin sinueux mais tout tracé !
Aujourd’hui je vis au Qatar, enfin j’essaye de vivre là-bas parce qu’avec la Covid je me suis retrouvée coincée à l’extérieur du pays au mauvais moment et j’ai perdu mon emploi chez Bein Sport. Je vais enfin rentrer chez moi prochainement, il faudra voir si j’arrive à retrouver un emploi sur place ou si je dois de nouveau m’expatrier. Ma vie est faite de moments où j’ai dû accepter de me jeter à l’eau dans le grand bain et de voir si j’arriverais à nager… Cette péripétie n’en est qu’une de plus finalement et je l’accepte avec philosophie.
Le passé
Je suis athlète de haut niveau en équitation concours complet à l’adolescence. Clairement, j’ai des ambitions et les moyens de mes ambitions. Mes parents ne sont pas sportifs mais convaincus de l’intérêt du sport en compétition pour t’aider à te construire. Peut-être même un peu trop parce ma mère l’année de ma terminale me couvre alors que je sèche les cours pour m’entraîner, je dois aller rejoindre après mon bac Mark Todd (élu meilleur cavalier du xxe siècle par la Fédération équestre internationale) pour m’entraîner avec lui, autant dire qu’entre les cours de philo et l’entrainement, j’ai vite choisi. Mais voilà je rate mon bac… Mon père siffle la fin de la récrée, ce seront les études avant tout maintenant et tout s’arrête brutalement. J’ai mon bac, je ne pars plus en Angleterre mais aux USA, je me lance dans des études de droit et j’arrête petit à petit l’équitation. Je voyage beaucoup dans le cadre de mes études mais il faut attendre un petit copain ultra pas fiable pour que finalement ma vie rebascule une nouvelle fois. Nous avons comme projet de partir en vacances découvrir l’Amérique du Sud. Il traîne encore et encore à prendre ses billets et moi persuadée qu’il va le faire je prends les miens. Et il me plante… Et comme je veux faire ma fière, je mouche mon nez et je pars sans lui pendant deux mois et demi. C’est là-bas que j’ai découvert que je pouvais voyager seule. Très vite je multiplie les destinations, toujours seule et toujours bien décalées, je suis quand même allée faire de la plongée en Papouasie Nouvelle Guinée ! Je découvre le trekking, je grimpe de plus en plus haut, la montagne, la Haute Montagne m’attire de plus en plus mais pour tenir le choc il faut reprendre le sport.
A cette époque je travaille à la capitale, et en bonne trentenaire qui peut se le permettre je m’inscris à l’Usine, La salle de fitness du tout Paris. Je découvre qu’on y court aussi un marathon, d’abord en spectatrice mais ça fait tilt dans mon esprit. Comme en plus dans le cabinet dans lequel je travaille, plusieurs se sont inscrits pour la prochaine édition, je décide que moi aussi je veux en être. Nous sommes en septembre, je n’ai jamais couru, Paris est en avril, mais je ne me pose pas vraiment de question. Enfin si une… Comment vais-je gérer mentalement une compétition que je n’ai aucune chance de gagner ? Je vous imagine en train de sourire derrière votre écran mais c’est pourtant bien la réalité. Pour la première fois de ma vie, j’envisage le sport uniquement pour le plaisir et non plus avec comme seule ambition l’envie d’être la meilleure dans ma discipline et c’est une vraie révolution ! Je finis Paris, je ne gagne pas Paris mais le virus est pris. J’enchaîne les marathons, un tous les trois mois environ tout en continuant à faire de la montagne.

Et puis là encore ma vie change… J’accepte un poste au Qatar. Tous mes amis m’encouragent à me lancer sur triathlon sans que je sois vraiment convaincue mais à l’occasion de mon apéro de départ, tout mon petit groupe remet ça : « il fait toujours beau au Qatar, nickel pour s’entraîner à vélo. Allez, on fait le Half d’Aix en Provence tous ensemble ». Et moi de répondre : « euh pourquoi Aix alors qu’il y a Nice ? » Ok, commence déjà par acheter un vélo Perrine… Je dois regarder youtube pour apprendre à gérer les vitesses ! Evidemment je me vautre lamentablement avec les calles… Mais je m’accroche et un jour je décide d’aller faire 180km d’un coup alors que je n’ai jamais fait plus de 30km. Ok j’ai passé le week-end à dormir mais j’en suis convaincue, je peux finir ce foutu Ironman. Je m’inscris seule, les copains me prennent pour une folle ! Je prends un coach et c’est parti. L’Half d’Aix se passe plutôt bien et Nice est déjà là. Ce qu’il faut savoir c’est que c’est ce jour-là que j’ai franchi mon premier col à vélo. Vous croyez que c’est comment vous le Qatar ? C’est plat de chez plat… N’empêche je finis en 12h et là encore le virus est pris. Forcément après Nice, je veux Hawaï, les slots et tout le toutim. L’esprit de compétition n’est jamais bien loin, il suffisait juste que le vent du désert souffle sur les braises pour le rallumer. Il faut dire qu’étant toujours célibataire sans enfant forcément ça aide un peu à vivre sa passion à fond.

Mais bon, force est de constater que contrairement à l’équitation, je reste coincée sur la 3ème marche du podium… et là le défi de l’Enduroman arrive, avec l’entraînement qui va avec forcément. Je découvre alors l’univers de l’ultra cyclisme, qui me permet à la fois de boucler cette foutue course mais surtout de découvrir le bonheur inouï qu’il y a à voyager à vélo, seule ou accompagnée parfois de Steven Le Hyaric. Je peux faire ma trace, réunir en une seule discipline ma passion des voyages et du vélo. Traverser des pays sur deux roues permet d’aller au contact des populations comme jamais, on est forcément accueilli totalement différemment par les locaux, surtout quand on est une femme. Attention je ne pars pas non plus comme ça la fleur au fusil, ou plutôt le gps au guidon ! J’anticipe, je prends ce qu’on appelle des fixeurs, des personnes qui seront là tous les jours pour t’accueillir. Et comme le téléphone arabe fonctionne souvent mieux que la 5G, très vite ça fait le tour de la région qu’il y a une femme qui pédale dans le coin, même que mon cousin bosse pour elle. J’ai roulé au Pakistan, en Iran… Mon souvenir le plus compliqué ? L’Ethiopie où pour la première fois j’ai vraiment eu peur même si tout s’est finalement bien terminé. Ce que toutes ces expériences m’ont apprises ? Le lâcher prise avec le fait qu’à un moment il va falloir faire confiance à son prochain. Et ça c’est loin d’être aussi évident qu’on ne le pense. J’évite la vie nocturne, surtout dans les pays où l’alcool circule comme c’était le cas en Papouasie par exemple. Des hommes adorables dans la journée peuvent se révéler très dangereux la nuit venue avec l’alcool… Je ne cherche pas non plus les ennuis.

L’avenir !
Mes projets ? Déjà et avant tout retrouver un travail ! Tous mes gros projets d’ultra cyclisme sont mis à l’arrêt pour les raisons que l’on connait. Je devais aller rouler dans le Caucase, en Arménie, en Arabie Saoudite, retourner en Iran pour aller rouler avec un groupe de femmes cyclistes. On le sait peu et même les femmes là-bas ne le savent pas mais rien ne leur interdit de pédaler en toute liberté, avec un petit groupe d’iraniennes nous essayons de montrer l’exemple. Je soutiens comme je peux l’association Free to Run qui fait le même travail en Afghanistan. Question purement sportive, j’ai découvert l’ultra trail avec la TDS l’année dernière mais surtout la Swiss Peak cette année. Ce fut un vrai coup de foudre, une expérience totalement dingue où j’ai passé 5 jours en montagne sans avoir envie de rentrer. Je me suis retrouvée là, perchée à observer ce lac où la ligne d’arrivée m’attendait sans avoir vraiment envie d’y aller, un peu comme Moitessier… Mes collègues de dossard qui m’entouraient à ce moment avaient la même envie, celle de repartir faire un tour ! Je compte bien y retourner, le Tor ou autre rigolade dans ce genre. Il faut dire que l’expérience suisse s’est parfaitement déroulée avec une organisation aux petits oignons, des bases de vie ultra confortables où tu pouvais vraiment dormir les deux heures que je m’étais autorisées dans le silence et la tranquillité. J’ai débloqué quelque chose en descente également alors que j’étais plutôt trouillarde, grâce à ces plaines ultra pentues mais herbeuses à souhaite qui te donnent des envies de rejouer le générique de « La petite maison dans la prairie ». J’ai hâte de pouvoir y retourner !

Vous l’aurez compris avec ce petit portrait, les aventures de Perrine sont loin d’être finies !
Vous pouvez la suivre sur insta ici et sur FB là.