Run : La tactique de l’acide lactique

« T’as l’acide lactique qui pique ? » Le lendemain d’un marathon, alors que vous marchez en canard et que vous attaquez les escaliers en crabe, c’est la phrase qu’on vous sortira à coup sûr à la machine à café. Et pourtant, comme pour les crocodiles dans les égouts de New York cela tient de la légende urbaine. Nous allons tout vous dire sur la tactique de l’acide lactique.

 
Je me shoote à l’acide…
Avant de comprendre comment vous allez pouvoir lutter contre ses effets, il faut d’abord comprendre d’où il vient. Le lactate est le résultat d’une longue chaîne d’utilisation du glucose au niveau des muscles : la glycolyse. Et si on le considère comme un déchet métabolique c’est parce qu’il arrive en bout de la chaîne. Et il faut arrêter de croire qu’il ne sert qu’à vous faire mal ! Il est aussi utiliser par bon nombres de vos organes comme le cœur, le cerveau… Et oui ça ne sert pas qu’à vos muscles ! En fait il les alimente au même titre que le glucose par exemple. C’est votre foie qui le synthétise pour le transformer en « carburant énergétique ».

 
Mais alors pourquoi j’ai mal docteur ?
L’acidose qui va provoquer ces foutues courbatures et souvent pour nous les femmes le syndrome des jambes lourdes (bon les hommes en souffrent aussi, y a une justice en ce bas monde !) est en fait provoquée par les ions H+, déchets sécrétés conjointement par notre organisme lors d’un effort intense. Mais ce qu’il faut savoir c’est que ces foutus ions ne sont pas uniquement produits en duo, ils peuvent l’être seuls. Incriminer le lactate serait une erreur puisque, vous ne le savez peut-être pas mais il est même dans les perfusions de certains patients lors d’interventions chirurgicales.
Donc pour résumer, c’est l’acidose musculaire qui fait souffrir. Lorsque l’on court, l’utilisation du glucose musculaire, ce qu’on appelle aussi la glycolyse augmente l’acidose des muscles. Les ions passent ensuite dans votre sang. Pour un retour à la normale, il faut que se mette en place ce qu’on appelle un système tampon sanguin. Cette réaction donne de l’eau (vous gonflez…) et du gaz carbonique. C’est pour cela que vous vous essoufflez. Une fois que vous avez retrouvé évacuer ce surplis de gaz carbonique, vous retrouvez votre souffle et vous courez longtemps… très longtemps.

 
Et un jour ça s’arrête ou pas ?
Pour que cela arrive, c’est facile : il faut s’entraîner encore et encore ! L’idée est d’habituer votre organisme à gérer les effets secondaires de l’effort physique. Pour faire simple il faut que les temps d’entrainement s’allongent et que les temps de récupération diminuent pour que votre corps augmente naturellement sa capacité à supporter l’acidose musculaire. Mais ce serait une erreur de négliger ces phases de récupération qui sont indispensables.

 
Mais pourquoi mes muscles me font ça ?
Reprenons depuis le début : le muscle est constitué de milliers de cellules de forme allongée, les fameuses fibres musculaires et il est rattaché au squelette par les fameux tendons qui nous font eux-aussi souffrir. Si l’on y regarde d’encore plus près, on peut apercevoir des filaments minuscules dans lesquels les contractions musculaires vont prendre naissance grâce à l’action conjointe de deux protéines, l’actine et la myosine, qui ont la propriété de se contracter et de se relâcher. Elles font donc bouger le muscle. Vous pouvez souffrir pendant un effort ou après, ou même les deux ! Et pour ne plus souffrir ou tout du moins souffrir un peu moins, le principe est simple : s’entraîner pour que le corps apprenne à se défendre naturellement. Plus sollicités, les muscles conditionnent et se régénèrent de plus en plus vite et de façon plus profonde. Ils deviennent plus résistants.

 
Vous l’aurez compris, sans l’entrainement point de salut ! Si vous voulez ne plus avoir de courbatures il faudra en passer par des séances régulières, des efforts réguliers. Bon nombre d’enragés de marathon qui les courent comme d’autres enfilent des nouilles sur un collier vous le diront : les courbatures de lendemain de marathon ont totalement disparu de leur vie sportive, ce qui leur permet de courir encore plus de marathons ! CQFD… Alors vous savez ce qu’il vous reste à faire !

Pour aller plus loin… 

Trois types de course, trois mécanismes énergétiques différents
Le sprinter de 100 mètres : forcément l’effort est court mais très intense. Toute l’énergie nécessaire dont il a besoin est déjà dans ses muscles sous forme d’ATP et de créatine phosphate. Les muscles n’ont pas besoin d’apport en oxygène pour ce type d’effort. Les muscles utilisent l’ATP pour la CP et si besoin tapent ensuite dans la réserve de glycogène. Une petite quantité d’acide lactique est produite.
Le coureur de 800 mètres : comme le coureur de 100 mètres, il va épuiser ses réserves naturelles de d’ATP et de CP. Mais évidemment l’effort est plus long et le muscle va aller piocher dans la réserve de glycogène pour terminer la course. Comme l’athlète est en mode anaérobie (pas d’apport d’oxygène), la transformation de ce dernier en ATP produit de l’acide lactique. Au-delà de 100 secondes, l’oxygène (aérobie) rentre dans la course si je peux dire et va aider au processus de transformation.
Le marathonien : Evidemment l’effort est long et même si le départ peut parfois ressembler à la course du coureur de 800 mètres, ce n’est pas forcément une bonne idée…
S’il est plus lent, le mode aérobie procure cependant au marathonien tous les éléments nécessaires à la production d’énergie : le flux sanguin véhicule vers le muscle de l’oxygène, du glucose, de même qu’un nouveau type de carburant, le gras, sous forme de lipides.
Pendant le trajet, le marathonien modulera l’intensité de son effort. Lorsque celle-ci sera faible, ce seront surtout les lipides qui serviront à produire l’énergie. Inversement, l’énergie requise pour un effort plus intense sera fabriquée à partir du glycogène. Les boissons énergétiques qu’il avale en cours de route sont, notamment, un renfort de glucose.