Eh oui, je ne vais pas vous parler running, je vais vous parler littérature, la vraie et même Histoire, celle avec un grand H qui n’est finalement faite que de petites… Quoi ? C’est mon blog et je fais ce que je veux ! Alors ce dernier Goncourt il vaut quoi ?
Je l’avais vu à sa sortie au printemps dernier, notant dans un coin de ma tête qu’il me faudrait le lire un jour et puis voilà ça m’est sorti de la tête… Jusqu’à une interview de Bernard Pivot, membre de la célèbre académie Goncourt, quelques jours avant le grand jour. Il en disait tout le grand bien qu’il en pensait et son ton très complaisant m’avait mis la puce à l’oreille. C’est donc sans réelle surprise que j’ai appris qu’on donnait le précieux sésame, celui qui ouvre les étagères et les tables basses de milliers de foyers au livre d’Eric Vuillard, « l’ordre du jour ». Il est vrai qu’il y avait de quoi être surpris parce que le livre ne correspond pas du tout à ce que récompense d’habitude la petite bande du Drouant. Quoique… Après « les Bienveillantes » de Littell en 2006, abordant dans ses 1403 pages (!) un savant mélange de musique et de camps d’extermination pour finir par la chute de Berlin, on pouvait penser que le jury était friand de livres sur cette période sombre de notre histoire. Bon entre temps ils ont vieilli au comité parce que celui-là n’est fait que 150 et encore c’est un petit format.
Là rebelote ! L’Ordre du Jour se constitue en réalité de petites histoires racontées comme des nouvelles qui jettent un regard incisif et pas du tout neutre comme un historien devrait le rester, des petites histoires qui ont entourées la naissance du 3ème Reich. Ce qui pourrait presque s’apparenter à des détails à la vue des événements tragiques qu’il engendrera, n’en sont pas… Entre la négociation de l’entrée de l’armée allemande en Autriche qui tournera en fiasco militaire contrairement à ce que les images venues jusqu’à nous laissent penser, aux réunions secrètes réunissant les grands capitaines d’industrie allemands qui à coup de millions ont financé la campagne d’Hitler (sociétés ayant évidemment toujours pignon sur rue) sans oublier l’incroyable dernier dîner entre l’ambassadeur d’Allemagne à Londres et Churchill pour ne citer que ces moments, ce sont beaucoup plus que des petites histoires. A travers ces faits, Eric Vuillard appuie là où ça fait mal… et rappelle à quel point cela n’a pas tellement changé de nos jours. C’est passionnant pour toute personne qui aime voir l’Histoire par le petit bout de la lorgnette. Et vous ne regarderez plus jamais votre micro-ondes ou le costume de votre mariage de la même façon…
Mais parce qu’il y a toujours un mais avec moi, ne vous attendez pas si vous êtes comme moi fan de roman historique à leur style souvent « scolaire » ou tout du moins veillant à être le plus didactique possible. Là je dirais pour faire court et simple : c’est comme si Marcel Proust racontait la seconde guerre… C’est réellement une œuvre de littérature pure avec un style pas forcément très abordable de prime abord. Il m’a fallu m’accrocher un peu pour intégrer sa façon d’écrire. Et vous en voulez une bonne ? Soit l’auteur travaille en sous-marin pour l’Elysée, soit celui qui écrit les discours de notre très cher président avait eu du flair et avait lu le livre avant qu’il ne devienne un succès de librairie… p11 : « j’ignore qui était le premier de cordée, et peu importe… ». C’est parce que j’ai fait le Mont Blanc en août qu’ils sont tous passés en mode métaphore « alpinistique » ? Bon j’attaque le Renaudot de ce pas qui est je vous le donne en mile un récit de la fuite non à Varenne mais en Amérique du Sud de ce charmant Mengele… Vous l’aurez compris, je suis très branchée Seconde Guerre, ça tombe plutôt bien cette année !
En résumé : à lire pour ceux qui aiment vraiment l’histoire et le style ampoulé où il faut parfois revenir en arrière pour trouver le verbe et le sujet, histoire de pouvoir briller dans les dîners avec des petites histoires à raconter. Maintenant 16€ pour 150 pages… faut quand même être motivé !