Elle n’a jamais aussi bien portée son nom pour notre Nathalie Nationale qui a pourtant su s’adapter et surmonter les difficultés pour décrocher une troisième place bien méritée sur la désormais célèbre Hardrock 100. Elle nous raconte son aventure américaine.
Comment s’est passé ta course ?
C’était un peu plus dur que ce que je l’avais imaginé… J’avais confiance dans ma préparation mais l’altitude fait vraiment la différence. Pourtant je suis arrivée en famille le 1er juillet pour m’adapter un peu. Nous étions logés sur la fin du parcours à 2900m mais dès le départ j’ai compris que ce serait un peu compliqué. J’ai fait des repérages comme je le fais souvent mais mon cœur plafonnait et n’arrivait pas à aller au-delà de 100 pulsations. J’étais collée au sol… Au bout d’une semaine j’ai eu le sentiment que ça allait un peu mieux mais la dernière sortie n’a pas été rassurante. J’ai mis ça sur le stress de la veille d’un gros objectif mais très vite j’ai compris que ce n’était pas ça. J’ai pris le départ avec Caro (Caroline Chaverot évidemment !) mais j’ai accepté le fait que je ne pouvais pas tenir son rythme et j’ai lâché l’affaire. Sur un plateau au 20ème mile, je me souviens m’être dit « allez, envoie un peu là, c’est roulant ». Mais les 3900m d’altitude m’ont cloué sur place. En fait, la difficulté de cette course, c’est ça… gérer l’altitude. Et les conditions climatiques super changeantes ! Lors de ma reconnaissance, dans le dernier tiers, j’ai passé un col parfaitement sec. J’y suis repassée le jour de la course, il était enneigé avec du verglas… pas vraiment la même chose ! Heureusement que j’avais mon pacer avec moi à ce moment-là, ça m’a bien rassurée de ne pas être seule. On a même eu une averse de grêle dantesque avec 5cm de grêlons au sol ! Et comme j’étais à un moment de descente, là aussi j’étais bien contente que plusieurs coureurs soient là. Nous avons géré ça à 4 pour se sécuriser les uns les autres. Mais ce n’était pas fini… On enchaînait avec le point culminant de la course, un col à 4300m. Là, mes mains se sont mises à gonfler tétanisées par le froid. J’étais très légère en matos puisqu’il n’est pas obligatoire et mes gants ne suffisaient pas. J’ai même eu du mal à manger au ravitaillement tellement elles tremblaient. Je savais qu’au ravitaillement suivant après la descente mon mari m’attendait et mon pacer aussi. Ça m’a donné la force de continuer tout en me disant déjà que de toute façon si cela ne revenait pas à la normale, je m’arrêtais là. Et elles sont revenues à une taille normale dans la descente… Et j’ai continué ! J’ai fait 20 miles avec mon pacer Amy qui connaît très bien le parcours. Je me suis aussi retrouvée à jouer au chat et à la souris avec Anna Frost, ça m’a réveillé ! Mais bon franchement la fin n’en finit pas… je savais que j’allais avoir à traverser une rivière mais je ne la voyais pas arriver… Je l’ai attendu longtemps cette foutue rivière ! Et puis enfin la ligne d’arrivée où l’organisateur vient t’accueillir. La course, le village qui l’accueille, c’est tellement petit qu’il rameute tous les concurrents déjà arrivés, les spectateurs qui sont au chaud dans le gymnase pour venir t’acclamer. Mes enfants m’attendaient avec un chapeau de cow-boy tricolore, ça a fait son petit effet auprès du public américain !
Le parcours est comment ? Différence par rapport à notre UTMB ? Et la fameuse ambiance à l’américaine ?
La grande différence comme je l’ai dit précédemment c’est l’altitude. Autant la Western States est hyper roulante et même en majorité descendante, autant celle-là c’est clairement montagnard et finalement on marche plus qu’on ne court, ce que je n’apprécie pas forcément. L’UTMB si on parle uniquement terrain est plus technique mais moins haut. Ce sont donc deux courses qui n’ont rien à voir et sont donc difficilement comparable. C’est valable aussi pour l’ambiance. Avec seulement 150 coureurs au départ, forcément l’organisation est au petit soin pour nous. Tout le monde, tous les villages sont mobilisés pour assurer les ravitaillements. Le départ se fait dans une rue du village, pas de musique, pas de pistolet, juste l’organisateur qui crie un décompte approximatif et c’est parti. On ne peut pas comparer une course comme celle-là avec une course de 2000 concurrents qui nécessite une logistique totalement différente et forcément un peu moins chaleureuse. En fait ce n’est pas une simple question de pays ou de mentalité, juste une question de taille avant tout.
La dream team ! Vous noterez les chouchous patriotes !
Courir avec ou sans matériel obligatoire, ça change vraiment la donne ?
J’ai pris un sac de 3 litres, pour mes flasques et pour mes bâtons que j’ai vraiment utilisés même dans les descentes pour m’assurer tellement elles étaient pentues. Sur la journée j’avais une gore tex, des gants pour la nuit et une sous-couche qui sera finalement restée dans le sac. Sur la Western, je suis partie carrément avec une barre et juste une flasque ! Forcément, j’aime bien courir léger comme ça, c’est l’idéal mais cela n’est possible que parce que l’organisation particulière le permet. Il y a 14 ravitaillements et surtout il ne faut pas perdre de vue que si les élites courent léger, ce n’est pas du tout le cas du reste des coureurs qui courent équipés eux comme sur tous les ultras parce qu’ils mettent tout simplement beaucoup plus de temps que nous à aller d’un ravitaillement à l’autre !
Et ces fameux pacer qui n’existent que là-bas, ça aide ou pas ?
Ce système varie même d’une course à l’autre. Sur la Western ils arrivent sur la deuxième partie du parcours pour t’aider à tenir un rythme régulier et t’aider à rester vigilant. Sur la Hardrock, tu fais comme tu veux, tu peux en avoir plusieurs et tu choisis, tu annonces à l’organisation où ils seront placés et combien de miles ils vont faire même si j’ai l’impression qu’on est quand même libre de choisir s’ils font un peu plus de miles avec toi. J’avoue que je n’ai pas posé la question mais cela ne semblait pas strict. Cela me rappelle vraiment l’ambiance du multi-sports du coup que j’ai pas mal pratiqué dans ma vie sportive. J’ai vraiment apprécié le soutien d’Amy et de Guillaume, aucun doute là-dessus ça aide à se motiver, à rester lucide quand la fatigue prend le dessus. C’est un vrai soutien moral, donc oui on peut dire que c’est une vraie aide.
Merci à Amy Sproston pour le reportage photo !
Que penses-tu de ce qui s’est passé pour Kilian ? de son choix de continuer malgré une épaule blessée ?
Je me demande surtout quelle image cela renvoie de notre sport ? Doit-on réellement continuer à tout prix ? Je ne suis pas sûre que ce soit l’image sportive que je souhaite faire passer surtout auprès du grand public. J’espère qu’il a pris du plaisir… Le problème c’est qu’il envoie comme message que l’on doit continuer, que l’on peut continuer même en mettant sa santé en danger et ça, comme je suis soignante de profession, ça me gêne forcément. Kilian est un être totalement à part, c’est comme ça, il doit être pris comme tel et pas forcément comme un exemple à suivre, surtout par les amateurs.
Merci à Nathalie pour le papotage toujours aussi agréable et rendez-vous est pris à Chamonix pour la CCC ! Et merci à Amy de m’avoir permis d’utiliser ses photos pour illustrer l’article.