Comme vous n’avez pas tous l’habitude de regarder les débriefs post course d’Alex alias Casquette Verte sur Twitch ou si vous êtes une boomer comme moi qui galère sur insta, voici la version écrite du Kullamannen by UTMB qu’il vient de gagner et qui lui permet d’assurer sa place au prochain UMTB à Chamonix en août 2023. Certes c’est plus old school mais pas de panique je vous ai mis aussi une petite vidéo à la fin !
La genèse
J’ai découvert cette course via la vidéo de l’édition précédente, et dès que j’ai vu le cheval, l’armure, j’ai tout de suite voulu m’y inscrire. Comme en plus elle fait dorénavant partie du circuit by UTMB, clairement j’avais en tête de soit y récupérer mes 4 running stones pour le tirage au sort de l’édition 2023, soit, mieux encore, un podium pour une sélection directe. Mais bon après mon enchainement, mes bobos à gérer, rien n’était gagné à l’avance.
Pour y aller, il faut savoir que c’est quand même loin d’être simple. Avec mon pote Loïc, on a pris l’option avion jusqu’à Copenhague (avec en tête l’idée de pouvoir découvrir la ville à notre retour baskets aux pieds, ce qu’on a fait d’ailleurs, la trace est dispo sur mon strava pour info), puis un train qui relie le Danemark à la Suède, puis deux bus pour terminer. Attention, bon à savoir le train n’est pas un train international ! Les annonces sont donc faites uniquement en suédois ou en danois. Pensez-y !
Arrivés sur place, on est allé récupérer nos dossards, pour ensuite aller nous poser un peu afin de finaliser nos sacs, celui de la course mais aussi celui de la base de vie, puisque nous avons fait la course tous les deux sans assistance. Et bien entendu tenter de dormir un peu ! Direction ensuite le bus pour rejoindre la ligne de départ dans la nuit puisque, petit rappel à toutes fins utiles, c’est déjà l’hiver là-bas et qui dit hiver dit nuit qui n’en finit pas. Pour vous donner une idée, sur un peu plus de 15 heures de course, j’en ai passé 13 à la frontale. Autre point important à savoir avant de se lancer, l’espacement entre les ravitaillements ! Les premiers sont très mais alors très espacés, comptez un minimum de 25km avec un maximum de 36km ! Vers la fin de la course en revanche ils s’enchaînent tous les 10km, le dernier étant à 7km de l’arrivée (j’ai évidemment trouvé le moyen d’en rater un… il était planqué dans un chalet). Il y a une base vie où tu peux donc récupérer un sac. J’ai pris l’option de partir chargé au maximum de gels parce que j’en suis très gros consommateur mais clairement avec le recul, j’ai sous-estimé la quantité d’eau que j’ai bu. J’ai fini vraiment déshydraté. Pensez-y si vous vous lancez l’année prochaine. Dernière info importante à savoir sur cette course, l’assistance y est interdite, qu’on soit élite ou pas d’ailleurs.
La course
Pour reprendre des images qui parleront bien aux traileurs, on va dire que c’est une Saintélyon XXL version très feuillue avec des passages courts mais ultra techniques en mode Barkley mâtiné de « Projet Blair Witch ». C’est donc très roulant, avec des longueurs de plat forcément un peu usantes et tout d’un coup des passages où tu plonges dans les ronces ou sur des plages avec des éboulis de cailloux ultra glissants. Le tapis de feuilles est très vicieux puisque tu ne vois pas les cailloux planqués, autant dire que les chevilles morflent bien. Ils ont en moyenne 50% minimum d’abandon par édition, et ce chiffre peut monter encore plus haut, si les conditions météo ne sont pas favorables. Nous avons eu de la chance cette année, la météo était avec nous mais ça donne une idée du chantier. Prendre ses bâtons n’a pas de sens pour moi, ils vous gêneront plus qu’autre chose parce que les passages techniques, tu ne peux les passer qu’en y foutant les mains.
Tu fais d’abord une boucle qui t’oblige ensuite à revenir sur la ligne de départ. C’est assez étonnant à vivre, ça donne vraiment l’impression d’un reboot. Mais tu retournes ensuite sur cette fameuse boucle en en connaissant les difficultés, ce qui facilite un peu les choses. Ensuite direction la ligne d’arrivée en longeant la côte, la mer étant quand même toujours en fond d’écran de cet ultra très particulier.
Seul le premier finit avec le cheval qui le poursuit dans le village de pêcheurs où t’attend sur la ligne d’arrivée ta fameuse bague énorme qui te fait penser à celles que tous les vainqueurs de la NBA reçoivent et un manteau doudoune énorme qui franchement tombe plutôt bien après 170 km de course. Mauvaise surprise, la bière n’est en vente qu’à partir de 11h du mat… On m’a trouvé une canette de Heineken pour patienter mais j’ai dû attendre comme tout le monde pour amorcer sérieusement ma réhydratation.
Ma course
Comme toujours je suis partie plutôt rapidement avec mes Genesis aux pieds mais non, je n’ai pas pu rattraper le cheval parti au galop devant nous ! Très vite tu comprends que le balisage va être assez light, voir très light, et tu comprends pourquoi la trace à charger est obligatoire sur ta montre. C’est assez marrant d’ailleurs mais l’organisateur est très honnête là-dessus, tu es venu pour en chier et on ne va pas commencer à te faciliter les choses avec des ravitos XXL tous les 10km et un balisage tous les 10m… Alors certes le GR que l’on suit très souvent dès qu’on est en bord de mer est bien balisé mais le rétro fléchissant tu oublies… Ben oui… Qui aurait l’idée saugrenue d’aller se balader par-là la nuit aussi ? Et l’orga ne voit pas pourquoi elle irait rajouter des cyalumes pour nous faciliter la tâche. Mais franchement ça rajoute à la magie de cette course, ça lui donne cette ambiance clair-obscur que les peintres nordiques ont si bien représenté et que l’on est quand même bien venu chercher.
Les 24 premiers km je vais les faire avec Magnus le norvégien, qui est clairement meilleur que moi sur le plat alors je le laisse partir. Guillaume le belge va nous rattraper et nous fracasser au 35ème km ! Je suis donc 3ème quand j’aperçois 4 frontales derrière moi, et là je me dis que je vais lâcher le truc, que les 4 running stones c’est déjà super bien… que je ne pouvais pas non plus attendre mieux vu ma saison. Mais là surprise, non seulement les fameuses 4 lampes ne me rattrapent pas, mais mieux je rattrape le norvégien qui est en train de chercher ses air pods dans le tapis de feuilles. Alors là que les choses soient parfaitement claires, sans cette histoire de qualif pour l’UTMB, évidemment je prenais le temps de l’aider même si franchement mec… Un filaire t’aurait évité ce désagrément ! Et évidemment s’il avait été blessé ou autre, je m’arrêtais mais là… des écouteurs… Et puis je sais qu’il est meilleur que moi dès que ça redevient roulant donc je décide de tracer ma route. Et je deviens 2ème… ce qui change totalement mon plan de route. Surtout que pour une fois, je n’ai pas eu à gérer de vrais moments de moins bien comme ceux que je connais d’habitude… ces deux ou trois heures dans le dur comme celles que j’ai vécu au Col Ferret. Là, j’ai été régulier et capable de relancer dès que le parcours le permettait.
Repartir sur cette deuxième boucle que je connais déjà me donne une pêche pas possible alors qu’on aurait peut-être tendance à trouver ça ennuyeux, mais moi, le fait de savoir où je vais me motive vraiment à tout donner. Retour sur la ligne et je pars sur 60km de plat où je passe en mode Pac man puisqu’il y a dorénavant les coureurs du 100km que je vais finir par rattraper et doubler sous leurs encouragements d’ailleurs, ce qui était super sympa, vu que des spectateurs… ben en dehors des ravitos, il y en a pas !
Je vais prendre le temps à la base vie de me ravitailler mais surtout de bien récupérer mes batteries de secours parce qu’il m’est arrivé une petite déconvenue très désagréable. Ma Petzl en toute logique a commencé à marquer des moments de fatigue et lorsque j’ai changé ma batterie, au bout de 5 min j’ai le droit aux clignotements annonçant la fin. Idem pour la seconde… Je pense que ça doit être l’humidité et un mauvais conditionnement qui sont à l’origine de ce plantage mais en attendant, il ne me reste que ma petite lampe de secours, qui n’est absolument pas faite pour courir en réelle sécurité. Je donne tout pour rattraper un petit groupe de coureurs engagés sur le 100 pour rester avec eux jusqu’à la base de vie où dieu merci, je vais pouvoir récupérer mes batteries restées bien au sec qui fonctionneront sans problème.


J’ai doublé Guillaume au 120ème km qui est clairement dans un moment de moins bien mais comme ça n’en reste pas moins un coureur très fort, je vais rester persuadé un bon moment qu’il va finir par me reprendre dès qu’il sera sorti de sa phase down. Cela n’arrivera jamais et je finis par penser à la victoire à quelques km seulement de la ligne d’arrivée. Pourtant rien n’était gagné parce que franchement j’ai eu faim sur cette course… Leurs smörgås (tartines de jambon ou de fromage typiquement suédois), j’ai vraiment eu du mal et j’ai vidé mon stock de gels et de sel beaucoup plus vite que prévu. J’étais tellement déshydraté que j’ai fini par me lécher la main pour récupérer le sel de ma transpiration sur mon visage ! Du grand n’importe quoi… Mais j’avais clairement basculé en mode survie là.

L’arrivée était dingue ! Avoir un cheval à ses trousses avec un mec en armure qui vous poursuit toute lance dehors, avec la musique qui va bien, il faut dire que c’est peu commun. Je ne risque pas de l’oublier de si tôt ! Nan mais sérieusement, vous en avez déjà vu ailleurs des arrivées pareilles vous ? J’avoue que ça m’a tellement plu qu’il n’est pas exclu que j’aille défendre mon titre l’année prochaine puisque l’organisateur m’a déjà invité à revenir les voir.
Voilà vous savez tout ! Il ne me reste plus que la Lyonsaintelyon pour boucler l’année 2022 et penser à l’année 2023. Je sais déjà que je passerai par Chamonix puisque l’organisation m’a déjà contacté pour mon golden ticket. Ça sent le départ comme un bourrin pour rester dans le thème de cette fin d’année !
PS : on notera la superbe première place de Claire Bannwarth qui remporte la course féminine avec un temps de 18 heures et 21 minutes.
Le site officiel de la course est ici – L’insta de la course est là
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