PTL 2016 : Nathalie, un sacré bout de femme !

Je connais Nathalie depuis quelques temps souvent virtuellement d’ailleurs. C’est la magie des réseaux sociaux ! Alors quand j’ai su qu’elle serait au départ de la PTL, la version longue de l’UTMB, je me suis précipitée pour venir l’encourager. J’ai hélas raté son arrivée mais je l’avais prévenu, le debriefing s’imposait !

 

Pourquoi as-tu pris le départ de la PTL ?

 

C’est une bonne question c’est gentil de la poser ! Jusqu’à septembre dernier, ce n’était même pas envisageable pour moi. Jamais je ne me serais lancée comme ça, sans être avec les bonnes personnes qui connaissent parfaitement la montagne et le format de la PTL. C’est un format totalement différent dont il faut convient de rappeler le principe : on court en équipe, pas de balisage, tout se fait au road book… C’est tout simplement Bruno Ladet qui m’a contacté pour me proposer une place pour compléter son duo avec Xavier. On se connaissait avant quand même, je tiens à le préciser ! J’y vais, j’y vais pas… les deux personnes qui partaient connaissaient le format PTL. En 2013 Bruno n’a pas fini, il s’est grillé en partant trop vite avec son équipe. Didier avait vécu l’abandon précoce de la fille de son équipe après 50km seulement et lui-même avait dû renoncer après 250km en raison de problèmes aux pieds, comme souvent sur ce type d’épreuve. Aujourd’hui à cause d’abus, on ne peut plus si on est seul après l’abandon de son coéquipier intégrer une autre équipe pour finir… C’est terrible à dire mais c’est la réalité : partir à 3 permet d’avoir un fusible ! Mais il faut avoir conscience qu’il faudra finir à 2 coûte que coûte.

 

Comment t’es-tu préparée ? Et comment vous vous êtes préparés ?

 

Dominique Simoncini, mon coach m’a fait un plan sur mesure pour une prépa non seulement physique mais aussi psychologique. C’est là d’ailleurs qu’un bon coach fait la différence parce que le psycho ne doit surtout pas être négligé. On a essayé de se voir aussi le plus possible mais vivant à 3 h l’un des autres ce n’était pas toujours facile. Nous avons fait des sorties communes en février, juin et juillet pour s’entraîner mais aussi pour adopter une stratégie commune. J’ai aussi fait un week-end de reco sur site avec Bruno pour caler notre rythme, voir le type de terrain, cela nous a permis de déterminer un plan de marche. Bon on ne connaissait pas tous les types de terrain non plus et parfois ce que l’on devait faire en 2h, on l’a fait en 3 mais on s’en est plutôt bien sorti finalement. Maintenant qu’il n’y a plus le colonel (Marmier ici pour découvrir ce personnage hors du commun) on était dans le flou… Plus simple, plus compliqué… toutes les rumeurs circulaient. Apparemment, cette édition a finalement été ultra technique et engagée. Soyons honnête, l’inconnue du terrain ça reste quand même un truc difficile à gérer. On a eu les cartes que quelques jours avant de partir. C’est vraiment une aventure au sens large du terme.

 

 

Et concrètement alors ça a donné quoi ?

 
Dès qu’on a reçu les cartes précises l’inquiétude est montée d’un cran. Le Mont Buet par exemple, quand tu sais que tu vas devoir le grimper hors sente, ça panique un peu quand même… Il faut s’adapter que ce soit au terrain, à l’équipe, et même à toi-même. En reco, j’avoue, il est clair que certaines parties que j’ai eu à traverser je ne les aurais pas tentées mais l’équipe, l’adrénaline du truc te transcende. J’ai vraiment été au-delà de moi-même.
J’ai eu un gros doute en redescendant sur le Mont Buet la nuit… engagé et vertigineux… j’ai eu un gros doute en me demandant si j’allais survivre ! A la Fenêtre d’Arpette que j’avais repérée, là j’étais plus en confiance. Mais nous avons dû gérer l’abandon de Xavier le mercredi qui s’est retrouvé avec des plaies infectées, ne lui permettant plus d’avancer sans souffrir le martyr. Il a chèrement payé ses semaines d’entrainement. Il faut trouver le juste équilibre entre trop en faire et pas assez… il faut faire du qualitatif et non du quantitatif, parce qu’à un moment, qu’on le veuille ou non, le corps se venge. Moi je sais que si j’en fais trop, tous mes efforts finissent par être anéanti. Il avait fait le GR5 en juillet, ce qui n’était surement pas une bonne idée. Abandon à 5h du matin, le mercredi, il faut appeler le PC course, attendre dans le froid que l’organisation vienne le récupérer. Nous avons attendu presque 2h, comme si le temps était en suspens. Finalement j’ai annoncé que nous repartions et nous avons filé avec Bruno vers le refuge Champillon. On a mangé, dormi un peu et nous sommes repartis de plus belle. Nous avons absorbé le retard de façon ultra rapide à notre grande surprise. Pendant quelques heures nous avions perdu notre fil d’Ariane mais nous nous sommes finalement retrouvés. On s’est très vite adapté à cette gestion à deux. Même rythme, même façon de voir les choses, pas besoin de discuter. Après ça a roulé tout seul jusqu’à Chamonix, c’était naturel et simple. Evidemment, Jeudi et vendredi la fatigue était là, il ne faut pas rêver ! Mais nous savions que nous irions au bout.
Pourtant il y a eu encore des moments de doute… Pour atteindre le refuge Albert nous avons dû passer par des chaines et des câbles… Passer le col de la Seigne. Arriver au refuge suivant fut interminable. Je suis allée me coucher à peine mon repas avalé et je me suis endormie en une seconde. A tel point que les membres de l’organisation me trouvant quand même bien fatiguée voulaient nous arrêter là. Nous sommes partis sans demander nos restes ! Avec l’équipe n°13, nous avons filé à 4 vers le refuge de la Balme histoire de leur montrer que nous étions toujours dans la course… et nous en convaincre aussi d’ailleurs.

 
Pas de bobos finalement ?

 
Pas vraiment même si les cailloux m’ont un peu entaillée. Mais j’avais fait un énorme travail en amont de préparation de mes pieds en les tanant avec le protocole connu de tous les ultra traileurs. Et surtout dès que je sentais un frottement je protégeais. J’ai aussi beaucoup changé de chaussettes dont peu de paires sont rentrées à la maison ! Les descentes sont ultra exigeantes donc il faut absolument des pieds nickels pour les affronter. Aucune blessure à signaler mais vraiment on n’a pris aucun risque et la prudence fut toujours de mise. Question logistique, j’ai pris deux douches dans les deux bases de vie, à Morgex et à Champex. On n’y restait pas plus de 3h, on y mangeait, on se changeait, on remplissait nos sacs et on repartait. On a toujours aussi veillé à prendre un repas chaud par 24h, histoire de varier les plaisirs et changer de l’alimentation de course. C’est super important, aussi bien physiquement que moralement. On s’est aussi arrêté boire un coca frais de temps en temps ! Parfois tout ne se passe pas aussi bien… Au refuge de la Balme on ne peut pas dire qu’on ait reçu un accueil très agréable. Au Chalet des Miages là c’est l’environnement froid et humide qui ne facilite pas la récup. Les bénévoles présents avaient fait un feu de camp qu’il a été très difficile de quitter pour affronter le col du Tricot. On a dormi sur un bout de chaise avant de repartir…

 

 
Tu referas une PTL ?

 
Je ne refais pas plusieurs fois la même course mais un truc à étapes me tente bien. J’ai envie de tester ce format que je ne connais pas. C’est une super expérience qui s’est super bien passée alors autant rester sur une réussite ! J’ai été capable de faire ça c’est déjà bien non ? Même le Tor des Géants, franchement je ne sais pas… Pourquoi pas mais là franchement aucune idée. Bon, il y a 10 mois je ne savais que je ferai la PTL et encore moins que je la terminerai alors on va éviter les prévisions hasardeuses !

 
Ton pire souvenir ?

 
Je me suis retrouvée en pleine nuit, sur une via ferrata et je ne trouvais plus où poser mon pied… Bruno qui me criait « déconne pas, accroche toi » et là tu te demandes ce qu’il y a en dessous. Ça pouvait arriver, là, à cet instant et tu en as parfaitement conscience…

 
Ton meilleur moment ?

 
L’arrivée forcément ! Les rues piétonnes de Chamonix en folie et là tu sais que c’est vraiment vraiment fini. C’est l’aboutissement de tout ce parcours. Cette arrivée là reste très forte. C’est d’ailleurs un truc marrant parce que pour l’UTMB, il m’a fallu beaucoup de temps pour réaliser que je l’avais bien fait, alors que pour la PTL, c’est en rentrant en ville que j’ai réalisé. Au bout d’une semaine d’effort, tu réalises de suite. Tu sais !

 

 
Que retiens-tu de tout cela ?

 
Déjà que j’ai la fierté d’avoir fait la PTL dans les conditions originales, sans aucune assistance. Certains avaient clairement des sacs qui ne correspondaient pas à l’effort qu’ils allaient devoir fournir. Comme il n’y pas de contrôle des sacs puisque l’organisation, ne présentant pas la PTL comme une course, nous mettant face à nos responsabilités, certains profitent du système… Mais il y a une vraie et réelle solidarité entre toutes les équipes : on s’arrête toujours pour voir si l’autre va bien, le soutenir ou le secourir. Et je retiendrai surtout la phrase de Bruno qu’il m’a dite alors que nous avancions tous les deux : « tu es un sacré bout de femme ! Avec courage tu te surpasses toujours ».

 

Retrouvez le récit complet de Nathalie ici

CV express de Nathalie
– J’ai commencé la course à pied en 2010 en mettant comme objectif pour mes 40 ans le marathon du Mont-Blanc.
– A ce moment-là, mon compagnon (et mari aujourd’hui) Mika me parle de l’UTMB. Je décide de faire les courses qualificatives en vue de faire cet ultra avec lui (ultra des coursières, 6000D, Saintelyon…)
– UTMB en 2013 en 41h21
– Et d’autres courses par la suite : Eiger Ultra Trail (E101), Trail de l’Etendard, Ultra Trans Aubrac (avril), UltraDraille, mais jamais plus d’un 100 km par an. Le reste de l’année, ce sont juste quelques courses (environ 5) entre 30 et 60 km max.
– Et 2016 : PTL !