Pour cela je laisse la parole à la réalisatrice, Claudine Bosio qui nous parle de son projet.
« Au Pays de Marie »
Quand nous étions enfants il fallait nous hurler pour nous retenir. On courait pour échapper, combien il était difficile de nous tenir. Nous n’avions de cesse de repousser nos limites aux frontières de l’impossible. Courir vite, courir plus loin, c’est le plaisir de courir qui nous rend créatif.
Après on courait pour se nourrir et pour ne pas dépérir, on courait après de nouveaux lieux pour vivre mieux, pour être heureux. Mais aujourd’hui qu’est-ce qui nous fait courir ? Qu’en est-il de ces hommes et de ces femmes qui se lancent dans des épreuves de plus en plus longues, de plus en plus intenses qu’on appelle l’Ultra-Trail ?
Qu’est ce qui peut pousser quelqu’un à avoir envie de vivre une chose pareille ? Comment trouve-t-on le bouton intérieur qui nous ramène à l’état de courir dans notre vie ? Toutes ces questions mettent en évidence, pour moi, l’essence même de ce que nous sommes et de ce que nous sommes supposés être. Mais comme cela reste insuffisant à mon entendement, j’ai le désir d’aller voir sous la peau ce qu’elle dit et de la faire parler.
En 2013, j’ai participé à la traversée d’une course insolite dans la vallée d’Aoste : Le Tor des Géants, une traversée considérée comme la plus dure avec ses 330 km de tracé à fouler et ses 24 OOO m de dénivelé à avaler de jour comme de nuit, une boucle répartie en 6 étapes de 50 km chacune sur une durée maximum de 150 heures.
C’est parce que j’ai été en présence d’hommes et de femmes pour qui seule la présence d’un autre leur donnait la force de continuer. La seule chose qui comptait c’était de finir la course. Ils ne couraient pas pour se mesurer aux autres, mais pour être ensemble. J’ai vu des hommes et des femmes touchés par la grâce de l’inspiration artistique. Courir, courir, leur joie brute était incontestable. J’en ai vu d’autres qui au contraire étaient frappés, noyés par une vague noire d’anxiété et de réactions inappropriées. Entrer en force s’est avéré pour la plupart infructueux. Si courir est un acte créatif en soi, il y a toujours l’espoir de faire de soi, ce que tu veux être. Mais ce ne sont pas des dieux, ce sont des hommes et comme tous les hommes, ce qu’ils aiment le plus peuvent leur causer la plus grande peine.
Le défi de ce documentaire est de montrer un héros qui a des faiblesses dans le monde banal, puis de le filmer dans le monde fantastique du Tor des Géants, un monde qui va l’amener à résoudre ses faiblesses. Une fois de retour à la banalité de sa vie, le héros qui a trouvé des solutions, des clés, va faire de sa vie un terrain de jeu. C’est pour cela qu’il doit aller dans le monde fantastique qui lui ouvre des possibilités qu’il ne perçoit même pas lui-même.
Montrer que tout s’ouvre sur du magique, et que la clé de sa réussite repose sur l’imagination, déterminante pour mener à bien cette traversée. C’est la puissance de l’imaginaire qui va lui permettre de se dépasser et de transcender son existence. Ce qui m’intéresse, c’est ce qui se passe dans la tête, la part de son imaginaire dans l’action, dans son rapport au monde et aux autres. Comment sa capacité à imaginer, à créer, lui permet de passer de l’ordinaire à l’extraordinaire pour revenir à l’ordinaire. Qu’est-ce qui a changé ?
« Toute la vie d’un homme en une semaine et dans cette semaine, sa vie entière ».
L’histoire se centre sur un homme de 51 ans, Charlie. Je vais le suivre dans son univers intime, social et familial. J’ai choisi cet homme parce qu’en 2012, il a été contraint d’abandonner le Tor au 303ème km, pour cause de blessures, et que depuis il est resté sur des impressions douloureuses, un questionnement sans réponse et un désir profond de renouer avec cette course afin de comprendre ce qui lui a échappé. Peut-être va-t-il trouver des remèdes à des problèmes profonds. Je vais le filmer sur la course en direct de jour comme de nuit. Puis la course va s’étaler en plusieurs fragments, avec Nicolas un jeune trailer de 41ans, partagé entre l’enthousiasme et le doute, l’angoisse d’une toute première fois et la fierté de se lancer dans une traversée d’une telle amplitude. Pour Anne 47 ans, c’est aussi une première, elle montre des signes de fébrilité. Ce qui la caractérise, c’est d’être lente, toujours à la limite des barrières horaires à franchir.
Le récit sera complété d’une palette de coureurs d’une riche diversité culturelle. Les Valdôtains, organisateurs et bénévoles, sans eux rien ne serait possible. Ils dévoileront l’ambiance de la course et l’atmosphère qui y règne avec ses règles, son encadrement et ses enchantements. Durant cette traversée insolite, les trois personnages auront à franchir tous les obstacles pour mener à bien leur parcours. L’enjeu qui les attend est de savoir s’ils vont réussir à aller jusqu’au bout et comment ils vont y parvenir. De quels les éléments et de quels atouts vont-ils disposer pour parvenir à finir la course ?
Les spectateurs suivront comment chacun vit et gère sa course, ils découvriront les faiblesses des personnages au fur et à mesure de cette épreuve, et la manière dont chacun va pouvoir ou pas combler ses faiblesses. Ils mesureront l’impact que la course a sur eux, ce qui s’est passé avant, pendant et après la course. Ce qui a changé.
Ce film raconte l’histoire de toute une vallée rassemblée autour d’un événement unique, de ses hommes et de ses femmes qui ont su faire de leur région au fil du temps, plus qu’un lieu de vie, une leçon de vie, plus qu’une terre d’accueil, un terrain de jeu.
Oscar Perez et Lisa Borsani, parrain et marraine du film nous ont rejoint dans cette aventure.
Pour aller plus loin…
Appel à participation, aider nous à produire et à diffuser ce film.
Ce projet a démarré en avril 2014, il a été tourné en France et en Italie de Septembre 2014 à janvier 2015. Actuellement en montage, nous espérons le boucler pour la prochaine édition du Tor 2015 en septembre. Après la mise en forme du Trailer nous avons lancé un financement participatif pour nous aider à finaliser ce long métrage. Soutenir cette action permet de valoriser et encourager la production cinématographique d’auteurs indépendants et donc de favoriser la création d’œuvres singulières.
https://www.leetchi.com/c/projets-de-claudine-bosio
Contact production : Mezzotinto
mezzotintoprod@gmail.com
Claudine Bosio
claudine.bosio@gmail.com
Biographie et filmographie de Claudine Bosio
Née en 1957 à Casablanca, Claudine Bosio a suivi des études de psychologie et de psychanalyse à Nice et à Paris avant de s’orienter vers le cinéma. Elle est bouleversée à l’âge de 10 ans en voyant The Miracle Worker d’Arthur Penn qui la convint de se tourner vers la psychanalyse, une activité pour laquelle elle va se consacrer pendant 30 ans. Comme le dit Fritz Lang lors d’une interview avec Jean-Luc Godard « un metteur en scène doit être un peu psychanalyste, il doit marcher sous la peau d’un acteur, savoir pourquoi les gens du scénario font ce qu’ils font ». Passionnée de Cinéma, elle organise des conférences cinématographiques et psychanalytiques depuis 1998.
C’est en 2007, qu’elle passe à la mise en scène et collabore avec des photographes sur des projets Photographie et Cinéma. Cette année là, elle écrit un scénario de court métrage les enfants de l’ombre qui traite de la perte.
En 2009 elle est la 1ère assistante réalisatrice du court métrage Fragment d’Anastasia Bosio.
De 2010 à 2012 elle suit les Masters Class de scénario de John Truby à la Cinémathèque de Nice et de Paris. Encouragée par le travail de Svetlana Alexievitch, elle réalise « Tâche D’Encre » en 2013 son premier documentaire sur des portraits de femmes.
En 2014 elle s’attelle à la réalisation du documentaire Au Pays de Marie sur le dépassement de soi et prépare un scénario d’un long métrage Fiction « L’homme sans nom ».